Réfugiés climatiques : l’ONU privilégie une approche régionale plutôt que mondiale

Article paru sur le site de l’ONU le 08/11/2017

Alors que le nombre de personnes déplacées dans le monde à cause d’événements liés au changement climatique ne cesse d’augmenter, l’ONU et ses partenaires privilégient une approche régionale plutôt que mondiale face à la question de la création d’un statut de réfugié climatique.

La moyenne annuelle de déplacements liés aux catastrophes a été de 25,3 millions de personnes dans le monde entre 2008 et 2016, selon des chiffres du Conseil norvégien pour les réfugiés. Les cinq pays les plus affectés proportionnellement à leur population sont tous des Etats insulaires. Il s’agit de Cuba, de Fidji, des Philippines, de Tonga et du Sri Lanka.

« Au cours de cette saison des ouragans, nous avons vu le déplacement de 1,7 million de personnes à Cuba, soit l’équivalent de 15% de sa population », a noté la responsable du programme humanitaire d’Oxfam en République dominicaine, Camila Minerva, lors d’une conférence de presse sur la mobilité humaine et le changement climatique à la Conférence sur le climat (COP 23), à Bonn, en Allemagne.

« Les plus pauvres et les plus marginalisés sont cinq fois plus susceptibles d’être déplacés et de le rester plus longtemps que les personnes vivant dans les pays à revenu élevé, et ce phénomène s’accroît avec le changement climatique », a souligné Mme Minerva.

Protéger les personnes forcées de quitter leur pays à cause du changement climatique

Mariam Traoré, experte sur les questions de migration, environnement et changement climatique à l’Agence des Nations Unies sur les migrations (OIM), a déclaré de son côté qu’il était important de se rappeler qu’au-delà des catastrophes l’effet lent du changement climatique pousse aussi des gens à se déplacer et à émigrer, parfois de manière forcée.

Elle a pris l’exemple du Bangladesh, où selon un sondage de l’OIM l’année dernière 40% des ménages interrogés ont dit que le changement climatique a directement contribué à leur décision de migrer.

Face à cette situation, certains ont suggéré de créer un statut de réfugié climatique, permettant de protéger les personnes contraintes de quitter leur pays en raison des effets du changement climatique.

« Le statut légal de réfugié est prévu par la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés, qui énonce très clairement les raisons pour lesquelles vous obtenez ou non votre statut de réfugié, qui est essentiellement la persécution. Dans le contexte du déplacement causé par les changements climatiques, il pourrait y avoir des cas de persécution où ce statut de réfugié pourrait s’appliquer, mais dans la plupart des cas, ce n’est pas le cas », a expliqué Marine Franck, chargée de programme à la Division de la protection internationale de l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).

 

Une tentative en 2011 de créer un statut de réfugié climatique

Elle a rappelé qu’en 2011, il y a eu une tentative des Etats de mettre en place ce statut de réfugié pour les personnes déplacées par le changement climatique. « Mais la plupart des Etats ne sont pas prêts à ouvrir ce statut et certains considèrent d’ailleurs que cela pourrait diminuer la protection des réfugiés qui sont persécutés », a-t-elle souligné. « Cela voudrait dire également renégocier la Convention et les États n’ont pas envie de cela ».

« Donc plutôt que de créer un nouveau statut global pour protéger toutes les personnes déplacées par le changement climatique, l’on regarde ce qui existe aux niveaux national et régional », a-t-elle ajouté. Elle a cité la pratique des visas humanitaires, de la protection humanitaire et des lois nationales sur la migration permettant aux personnes déplacées à travers les frontières par le changement climatique d’être protégées et de recevoir une assistance.

Selon l’experte du HCR, l’idée est de créer au niveau régional « une harmonisation et d’inciter les Etats à prévoir dans leurs lois de telles pratiques pour protéger de plus en plus de personnes déplacées par les changements climatiques ». Il s’agit d’une approche « qui vient du terrain et qui se régionalise plutôt qu’une approche globale qui ne serait pas forcément mise en œuvre », a-t-elle ajouté.


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