L’aide humanitaire, une activité de plus en plus risquée
Article paru sur les site L’Echo le 19/08/2018 par Denis Laloy
Le nombre de travailleurs humanitaires tués augmente. Soudan du Sud, Syrie, Afghanistan et République centrafricaine sont les pays les plus risqués.
Colette Gadenne travaille depuis des années dans des zones de guerre, mais la peur est toujours la même quand des miliciens en armes font irruption dans l’hôpital où elle exerce pour Médecins sans frontières (MSF). Cette peur, elle l’a connue trois fois en trois semaines, fin mai et début juin, en République centrafricaine, où elle dirige la mission de MSF. Dans l’un de ces cas, les miliciens ont tiré 21 coups de feu avant de tourner les talons.
La République centrafricaine se trouve dans une situation particulièrement grave, mais les travailleurs humanitaires du monde entier font face à une recrudescence des meurtres, des enlèvements et des violences en tous genres commises au mépris du droit international censé les protéger.
Près de 140 travailleurs humanitaires ont été tués l’année dernière dans le monde, ce qui représente une augmentation de 23% par rapport à 2016, selon les données publiées cette semaine par le centre de recherches indépendant Humanitarian Outcomes. Pour la troisième année consécutive, c’est au Soudan du Sud que le bilan a été le plus lourd. La République centrafricaine, où les violences à l’encontre des ONG ont été multipliées par trois, est passée au quatrième rang, derrière la Syrie et l’Afghanistan.
Une marge de manoeuvre réduite
es risques qu’ils encourent limitent le rayon d’action et la marge de manoeuvre des travailleurs humanitaires, souligne Sofie Garde Thomle, chef du Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (Ocha) en Afrique occidentale et centrale. « Plus important encore, le manque d’accès signifie que nous sauvons beaucoup moins de vies. Il y a 10 ou 20 ans, c’était complètement différent », se souvient-elle, dénonçant la multiplication des atteintes au droit humanitaire et des violations des lois de la guerre.
« Nous discutons beaucoup avec les groupes armés (…), mais cela n’a pas fonctionné », déplore quant à elle Colette Gadenne, évoquant les 40 attaques essuyées l’an dernier par le personnel de MSF en Centrafrique.
Au Soudan du Sud, en mai dernier, neuf membres de l’organisation World Vision ont été enlevés et détenus pendant cinq jours, jusqu’à ce que l’Ocha obtienne leur libération. Ces dernières années, l’ONG a investi davantage dans la sécurité et la santé de son personnel, auquel elle fournit notamment un soutien psychologique sur place. Dans de nombreux cas, les travailleurs humanitaires ne sont pas spécifiquement visés, mais sont les victimes collatérales des violences commises de plus en plus fréquemment contre des civils.
Sur le même sujet
Discours du Lieutenant de Grand Maître au Corps diplomatique accrédité près l’Ordre souverain de Malte
09/01/2018. « Cette rencontre m’offre l’occasion de parcourir avec vous une année riche et complexe, pendant laquelle l’Ordre souverain de Malte s’est mesuré aux grands défis humanitaires… »
Rony Brauman: «On a cru pouvoir éradiquer les maladies infectieuses mais c’était une chimère»
24/03/2020. Médecin, spécialiste de médecine tropicale et en épidémiologie, Rony Brauman est l’ancien président de Médecins sans frontières (MSF). Il est aujourd’hui directeur d’études à la fondation de l’ONG.
Diplomatie d’influence et numérique
La diplomatie d’influence recourt de plus en plus au numérique dans toutes ses déclinaisons (applications, sites, réseaux sociaux…) ; le web social en est devenu un élément incontournable.