Droits humains : une arme diplomatique ?

Article paru sur le site de France Culture le 25/09/2019. Une émission préparée par Hélaine Lefrancois et Rosalie Suc

Les droits humains ne sont plus l’arme d’un seul camp. Ils continuent d’être utilisés dans les rapports de force mais les pays qui les brandissent comme excuse manquent parfois de crédibilité. Alors, comment les grandes puissances instrumentalisent les droits humains aujourd’hui ?

Ces derniers mois, les droits de l’Homme ont été utilisés, instrumentalisés comme rarement auparavant, et par des acteurs qui n’en respectent pas toujours les valeurs.

L’Arabie saoudite avait décidé d’expulser l’ambassadeur du Canada et de geler ses relations commerciales avec Ottawa après des critiques du gouvernement canadien sur la répression de militants des droits de l’Homme, notamment l’enfermement du blogueur Raif Badawi.

Le président égyptien Al-Sissi qui, en visite à Paris, explique que son pays n’a pas les mêmes valeurs, une réponse aux attentes françaises concernant les libertés fondamentales…

On l’a vu également lors du dernier G7 de Biarritz où Vladimir Poutine a fait la leçon à Emmanuel Macron en lui expliquant que le mouvement des gilets jaunes avait provoqué des violences policières inacceptables et qu’il ne souhaitait pas que de tels événements se déroulent en Russie, ce qui semble un peu malvenu de la part d’un responsable qui enferme ses opposants à tour de bras et qui n’hésite pas à faire éliminer les indésirables, de la journaliste Anna Politovskaia à l’opposant Boris Nestov en passant par l’ancien espion Serguei Skripall.

Nombreux sont les Etats à faire un usage des droits humains à géométrie variable. Donald Trump lui-même s’est trouvé une nouvelle cause du côté du Xinjiang avec la répression dont sont victimes les musulmans ouïghours, tout en séparant des familles à la frontière mexicaine. A moins qu’il ne s’agisse seulement d’un levier pour mettre la pression sur Pékin dans la guerre commerciale qui les oppose ?

Plus récemment encore, c’est le Pakistan qui vient de déposer une demande d’enquête auprès du Conseil des droits de l’homme de l’ONU sur la situation dans le Cachemire indien.

Extraits sonores

  • Le présentateur saoudien de la chaîne de télévision Al Ekhbariya présente aux téléspectateurs les enjeux de la crise diplomatique qui a concerné le Canada et l’Arabie saoudite en août 2018 (France 24, 06 août 2018)
  • Lors de sa visite au fort de Brégançon en août dernier, Vladimir Poutine a glissé une critique sur la gestion du maintien de l’ordre en France lors des manifestations de « gilets jaunes » (France 2, 19 août 2019)
  • Lors de sa dernière rencontre avec Emmanuel Macron, le président Al Sissi a estimé qu’il ne fallait pas regarder l’Egypte à travers des lunettes européennes en matière de droits de l’Homme (Euronews, 28 janvier 2019)
  • Nikki Haley annonçait en juin 2018 le retrait américain du Conseil des droits de l’Homme de l’ONU (Le Monde, 2 juin 2018)
  • À Srinagar, la capitale du Cachemire indien, les habitants restent coupés du monde. Début août dernier les autorités indiennes avaient imposé un couvre-feu et un « blackout », afin d’éviter un soulèvement populaire, après la décision du Premier ministre Narendra Modi de révoquer l’autonomie de la région (France 24, 14 août 2019)
  • Un réfugié cachemiri côté pakistanais raconte pourquoi ils ont fui et combien il est difficile pour eux de rester en contact avec la population restée dans la partie indienne (Arte, 14 août 2019)
  • Devant un camp d’ « éducation » à Dabancheng Angélique Forget et Antoine Védeilhé ont interrogé deux jeunes hommes sur la raison de l’emprisonnement de leur père et de leur grand-frère (Extrait du documentaire « Ouïghours, à la force des camps » diffusé sur France 24 et Arte en mai 2019)

Extraits musicaux

  • « Reich et Darwin » de Chassol (label : Tricatel)
  • Musique de fin : « Freedom » de Memphis Slim (label : Sonet)

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