Chrétiens de Palestine, Noël malgré la guerre

Article paru dans le Figaro le 23/12/2023 par Guyonne de Montjou

REPORTAGE – Onze semaines de conflit entre Israéliens et Palestiniens à Gaza ont diffusé l’effroi sur ceux qui partagent cette terre tant convoitée. À l’approche de Noël, dans une tension maximale, la minorité chrétienne continue d’invoquer la paix.

Cris et hurlements s’échappent de l’autoradio. Dans la voiture qui file le long des remparts de Jérusalem, la guerre jaillit. L’ocre de ces pierres, édifiées il y a vingt-cinq siècles, a viré au gris. À Gaza, une école vient d’être bombardée. La scène qui se déroule à 90 kilomètres étouffe les bruits de la Ville sainte. Quelqu’un a ouvert son micro à Gaza et diffuse les échos de la mort, via Radio Orient, dans toute la Palestine. Les cris de mères en pleurs, d’enfants paniqués, d’hommes révoltés résonnent d’une voiture à l’autre, en stéréo, à chaque arrêt au feu.

Depuis le 7 octobre, la vie en Cisjordanie s’est transformée en un sursis mâtiné de peurs et de culpabilité. Chaque Palestinien se croit le prochain sur la liste. Noël n’a jamais été aussi loin, en un mois de décembre. Comment célébrer l’Enfant né dans une mangeoire pour apporter l’amour sur la terre, quand une vengeance nue se déchaîne tout autour ?
À Bethléem, lieu de naissance du Christ, la boutique Prince de la Paix a tiré son rideau de fer. Les touristes ont déserté les rues qui bordent la basilique de la Nativité. Ses pierres grises et blanches luisent au soleil. Le dimanche matin, les fidèles vêtus avec soin affluent pour assister à la messe.

Crèche vivante

En famille, se tenant le bras, ils se courbent pour passer la porte trop basse qui mène au sanctuaire et se dirigent vers l’un des trois autels. Grecs orthodoxes, Arméniens, Latins, chacun prie Jésus selon sa liturgie depuis deux mille ans, dans ce berceau du christianisme d’où s’échappe une mélodie un peu cacophonique.

À Bethléem, les parents placent leur nourrisson de 40 jours à l'emplacement précis où est né Jésus.

À Bethléem, les parents placent leur nourrisson de 40 jours à l’emplacement précis où est né Jésus. Axelle de Russé © pour le Figaro

Comme dans un rêve, un couple apparaît derrière une colonne de la nef. La femme marche d’un pas pressé, serrant contre son sein un bébé. Héritières d’un passé qui n’en finit pas de se transmettre, observant un rite d’origine juive que les parents de Jésus ont perpétué au Temple de Jérusalem, les familles chrétiennes palestiniennes aiment venir à l’église présenter leur nouveau-né âgé de 40 jours, pour confier sa vie à Dieu. D’un pas tranquille, le trio accède à la crypte, antre creusé dans la roche où serait né le Christ : le lieu où Marie et Joseph se seraient installés près d’un bœuf et d’un âne, sur la paille, après avoir frappé à plusieurs portes d’auberge, il y a vingt siècles.

Le prêtre, vêtu d’une chasuble rouge, psalmodie. Ce prélat grec orthodoxe âgé de 40 ans goûte au spectacle de cette crèche vivante. « C’est un des noëls les plus tristes que j’aie à vivre, murmure-t-il une fois que la petite famille s’éloigne. On est meurtris. On pense aux enfants de Gaza, écrasés sous leur propre maison. » Dans un coin, un vieil homme lit sa prière en marmonnant les yeux fermés. Notre conversation avec le prêtre fait entrer la guerre dans un espace enfoui, tenu à l’abri de la fureur du monde. « Ici, nous essayons de vivre selon le message du Christ : nous restons sur cette terre car nous avons l’espérance que l’amour triomphera de la mort et de la violence », poursuit le père Issa, au fond de sa grotte, copiée un milliard de fois en toutes les crèches du monde, à laquelle on accède par un escalier escarpé, et qui semble devenue ici bien secrète.

Jésus, le gazaoui

« Savez-vous que Jésus, Marie et Joseph sont passés par Gaza lorsqu’ils ont fui vers l’Égypte ? Ils y seraient restés quelques jours », note, avare de mots, un Palestinien barbu au regard lumineux, avant de toucher une colonne de la basilique d’un geste familier. Les volutes d’encens s’élèvent de l’autel et glissent sur les parois.

Au-dehors, sur l’esplanade déserte, ce sont les effluves de café qui attirent quelques passants, à l’orée de l’hiver. Un vendeur de breuvages chauds, coiffé d’un béret et d’un keffieh, nous interpelle, dévoilant une bouche dépourvue de dents. « Pas de touristes ! Bethléem est mort ! Aujourd’hui, la guerre est à Gaza, demain elle sera ici », prophétise-t-il.
Dans le parc des Franciscains qu’éclaire un rayon de soleil, quatre adolescents discutent sur l’herbe, portable à la main, comme partout ailleurs. Les filles ont les yeux maquillés et les ongles faits, les garçons ont soigné leur mise. Leur coupe de cheveux dessine sur leur crâne un trait coquet. « Gaza, c’est à la fois nous et pas nous, commence la plus hardie. Demain, nos écoles seront fermées et tout le monde en Égypte, en Jordanie, au Liban, fera grève pour protester contre la guerre. Cela nous donne du courage pour résister et ne pas nous laisser abattre. »

«Sauvons ce temps d’innocence»

Trois religieuses appartenant à la congrégation de Mère Teresa se laissent interpeller sur le chemin de la messe. « On n’a pas de nouvelles des sœurs de notre couvent à Gaza. Il nous faut d’abord chercher la paix à l’intérieur de notre cœur, sourit tristement l’une d’elles venue d’Inde. Si la guerre et la désunion existent, c’est parce que nous ne prions pas assez. »

Ces trois religieuses françaises, en mission à Taybeh, sont appréciées de tous.

Ces trois religieuses françaises, en mission à Taybeh, sont appréciées de tous. Axelle de Russé © pour le Figaro

Patriarches et évêques de Terre sainte ont, cette année, donné une consigne de sobriété aux 182.000 chrétiens qui résident en Israël et dans les Territoires palestiniens : pas de sapin sur les places publiques, pas de festivités trop bruyantes lors de la veillée de Noël, l’heure est à la solidarité avec les Gazaouis.

« C’est une erreur, selon moi, affirme avec aplomb le curé du dernier village chrétien de Cisjordanie, situé à 45 kilomètres au nord-est de Bethléem, où le patronage et les écoles chrétiennes accueillent 75 % d’enfants musulmans. Les plus jeunes ont besoin de se réjouir et de goûter à la magie de Noël. Ici, nous essayons de les préserver de la tension du pays. Leur vie risque déjà d’être éprouvée; sauvons pour eux ce temps d’innocence. »

Minorité

Représentant seulement 2% de la population, les baptisés de Palestine se ressentent davantage en minorité depuis que les touristes ont déserté, et que les quelque 150.000 travailleurs philippins, sri lankais ou indiens sont rentrés chez eux après les attaques du 7 octobre. Ces étrangers permanents ou de passage gonflaient leurs rangs à l’église et dans certains quartiers.

Selon le Bureau central des statistiques israélien, la population des chrétiens palestiniens a été divisée par deux en vingt ans. Pris entre le marteau et l’enclume du conflit, certains saisissent la moindre opportunité de visa vers l’Australie, le Canada ou l’Europe, pour fuir ce chaos que rien ne semble parvenir à résorber. D’autres préféreraient mourir plutôt que de quitter leur terre.

Michèle et son mari possèdent un beau terrain à la sortie de Bethléem, sur les contreforts d’une vallée striée de routes et traversée par le mur de séparation. Ils possèdent tous les papiers attestant de leur propriété. « Avant le 7 octobre et la multiplication des checkpoints tenus par Tsahal, on pouvait arriver de Bethléem en vingt minutes. À présent, il nous faut une heure, voire plus. Tout est fait pour compliquer notre vie quotidienne, pour nous coincer dans les bouchons. Il y a de quoi enrager », explique dans la langue de Molière cette chrétienne née à Jérusalem, dotée d’un passeport français, au caractère bien trempé.

Le check-point de l’armée israélienne, sur les hauteurs de Bethléem, bloque la circulation depuis le 7 octobre.

Le check-point de l’armée israélienne, sur les hauteurs de Bethléem, bloque la circulation depuis le 7 octobre. Axelle de Russé © pour le Figaro

« Les bulldozers israéliens ont rasé à neuf reprises ma maison ici. Mon mari brandissait son crucifix pour les arrêter. Rien n’y a fait. Escortés de soldats, ils ont aussi détruit notre restaurant sur deux étages où tout le monde aimait venir, ajoute-t- elle en montrant sur son écran de téléphone la vidéo de musiciens jouant devant un banquet, dans une ambiance festive de noces, sous cette tonnelle disparue. En tant que chrétienne, fidèle à ma foi et à ma terre, j’ai choisi de saisir les tribunaux. Les avocats m’ont ruinée, mais j’ai fini par gagner, après dix ans de procès. Nous n’avons pas versé une goutte de sang. »

Figues sucrées

L’air épuisé, son mari nous apporte quelques figues sucrées ouvertes, cueillies à l’instant, et une poignée de kumquats juteux. Michèle poursuit son récit en désignant le haut de la colline, à 15 mètres de son portail : « Regardez ! Au bout de notre chemin, un colon s’est installé, avec 350 chèvres. Il a aussitôt eu l’eau courante, les abris pour ses bêtes, tout l’équipement qu’on nous refuse. Si je ne reste pas sur ma parcelle, alors son bétail viendra manger tous les fruits de mon verger, les feuilles des oliviers. C’est ce qui se passe chez nos voisins. Les Israéliens n’ont qu’une idée, c’est que nous quittions notre terre. Tous ceux qui ne viennent pas régulièrement visiter leur terrain, parfois avec la peur d’être attaqués par des extrémistes, risquent de le trouver vandalisé. Qui va décider de ma vie, à la fin ? Moi, je suis chez moi : je reste. »

Pendant que Michèle nous montre sa dernière cabane dont l’étanchéité est assurée par une couche de gazon en plastique, sans eau courante, et dont la cuisine spartiate niche dans un autre bungalow, un drone fait son apparition au-dessus de nos têtes pour nous filmer. Notre présence dérange.

Colonisation

Depuis 2008, mais surtout depuis les attaques du 7 octobre, certains disent que la colonisation en Cisjordanie a redoublé. La peur omniprésente et la tension qu’elle produit ont semé un chaos propice aux exactions de part et d’autre. En traversant le paysage montagneux de cette terre destinée – jusqu’à l’échec des accords d’Oslo (1992) – à devenir l’État palestinien, on découvre une multitude de sites surprotégés sur lesquels flotte le drapeau israélien.

Le mur de séparation de 9 mètres de haut, édifié à partir de 2001, coupe Bethléem en deux.

Le mur de séparation de 9 mètres de haut, édifié à partir de 2001, coupe Bethléem en deux. Axelle de Russé © pour le Figaro

Ces bunkers de béton sont des villes à part entière, extensives, entourées de routes électrifiées et de points de passages militarisés, ceux-là mêmes qui réclamaient la surveillance des militaires ayant déserté la zone de Gaza où s’est déroulée l’attaque du Hamas il y a près de trois mois. Sur les terres de Taybeh qui s’étendent au loin jusqu’à Jéricho, sur plus de 15 kilomètres carrés, jadis les Bédouins plantaient leurs tentes, avec l’accord des propriétaires chrétiens.

Avec le regain de tension, ceux-ci ont dû quitter la campagne et être accueillis plus près, par crainte d’attaques de colons. « Depuis le 7 octobre, les Israéliens sont impitoyables. Au moment de la récolte, fin octobre, ils sont venus avec des armes et des tiges d’acier chasser les propriétaires palestiniens et voler leurs olives, raconte un prêtre de paroisse. Soixante colons ont semé la terreur. Ils ont cassé les bras de deux de nos vieillards et frappé violemment plusieurs hommes. Les soldats sont arrivés en renfort pour les appuyer contre nous, qui étions désarmés. C’est un scandale. Une tentative d’occupation par la violence. Nous défendrons notre terre, quoi qu’il en coûte. À présent, nous organisons des rondes chaque nuit en quadrillant le périmètre qui appartient aux 1 300 habitants de Taybeh (village à 100 % chrétien, NDLR). Notre problème ici n’est pas le Hamas, c’est le gouvernement israélien fanatique et l’occupation ! C’est aussi qu’on nous empêche d’aller travailler. »

Vie offerte

Dans le village, une centaine de jeunes cadres se rendaient quotidiennement à Jérusalem pour honorer leur emploi. Avec la guerre, ils n’ont plus le droit de passer les check-points, même vers Jérusalem-Est, censé être le prolongement palestinien de la Cisjordanie. L’activité commerciale s’est effondrée de 60 % dans les villes, la manne du tourisme s’est envolée, tout comme la possibilité de circuler, et une quelconque visibilité sur l’avenir. « Nos 250 familles de Taybeh passeront Noël recluses, comme au temps du coronavirus », conclut le prêtre.
Captifs d’un étau qui n’en finit pas de se resserrer sur eux, sans perspective de trêve, les plus fervents chrétiens de Terre sainte se posent une question lancinante : « Que ferait Jésus à ma place ? » La réponse de sœur Marie-Martine rompt le silence de la belle église de Taybeh dans laquelle Charles de Foucauld est venu à deux reprises à la fin du XIXe siècle : « Jésus défendrait sa terre comme nous, sans arme et avec amour. » Sa complice qui la vouvoie, sœur Nelly, ajoute : « L’arme de Jésus, ce fut sa vie donnée, souffle-t-elle. Les belliqueux se détruisent eux-mêmes. Imaginez comment les personnes violentes se sentent lorsqu’elles rentrent chez elles et retrouvent leurs enfants… »

Non loin de là, sœur Claudine présente avec enthousiasme à ceux qui veulent comprendre la Bible à travers les pierres, la « maison des paraboles » dans laquelle les touristes affluaient il y a encore trois mois : « Il a passé la main sous le trou de la porte, est-il écrit dans Le Cantique des cantiques. Regardez cet orifice sur le seuil qui permettait aux visiteurs de s’identifier avant d’entrer », explique-t-elle en désignant la pierre fendue de cette maison traditionnelle palestinienne, bâtie il y a plus de trois siècles.

Oracle

La magie de Noël ne se niche pas dans un sapin. Elle est diffuse dans les propos de ceux qui ont choisi de vivre sur la terre que Jésus a foulée de ses propres pieds. Chaque lumière, montagne, ruine d’église, chaque situation, avanie ou miracle semble faire écho à un oracle prononcé il y a longtemps, donnant source et sens au monothéisme.

Cette année, les décorations de Noël restent éteintes en signe de solidarité avec les Gazaouis.

Cette année, les décorations de Noël restent éteintes en signe de solidarité avec les Gazaouis. Axelle de Russé © pour le Figaro

Ces paraboles affublent le présent d’une profondeur vertigineuse : un vieux jésuite américain, fin connaisseur du texte biblique, ose un rapprochement entre Hérode, prêt à tout jusqu’au mensonge pour conserver le pouvoir, et Benyamin Nétanyahou, l’actuel premier ministre israélien : « Jésus se trouve protégé par ces Rois mages rusés, venus de loin, qui repartent par un autre chemin. Ainsi en sera-t-il de la paix au Proche-Orient, sauvée par les puissances étrangères. »

Terre natale

Au-delà du texte biblique, impossible de ne pas percevoir la tension qui crispe le visage des soldats du XXIe siècle, lorsqu’on passe à proximité de leur guérite, des barrières qui séparent une bourgade de l’autre. Il est peu prudent de quitter sa voiture aux abords d’un point de passage militaire, de lâcher son volant ou de faire de l’humour, de peur de susciter une réaction imprévisible.
« L’un d’eux pourrait se retourner et me tuer à tout instant », explique Jacob sous son casque vert, la main sur sa kalachnikov, au check-point de DCO, proche de la colonie de Har Gilo. Les parents et leurs enfants sont contraints de faire un détour de quarante minutes chaque matin pour se rendre à l’école depuis la guerre. « Ce quartier de Beit Jala, peuplé de 9000 chrétiens, est truffé de terroristes du Hamas », poursuit sans ciller ce beau réserviste âgé de 33 ans qui ne voit sa femme et ses enfants que toutes les trois semaines depuis le 7 octobre.
« La nuit, plusieurs fois par semaine, on entend les rondes de l’armée israélienne faire des descentes dans la ville. Parfois, les soldats enfoncent une porte, entrent dans une maison, enlèvent un habitant, souvent un jeune homme. Parfois on entend des tirs, on déplore des morts », raconte un guide palestinien qui a choisi, après son diplôme d’expert-comptable obtenu en Californie, de retrouver sa terre natale et d’y élever ses quatre enfants avec une joyeuse ardeur.

Dans un foyer chrétien du vieux Jérusalem, on prépare Noël pour les enfants.

Dans un foyer chrétien du vieux Jérusalem, on prépare Noël pour les enfants. Axelle de Russé © pour le Figaro

Outre les pèlerins du monde entier, Bethléem s’est vidé des fiancés qui, chaque année, arrivaient de Gaza selon un rituel rodé jusqu’à la guerre récente, l’État israélien octroyait près de 400 laissez-passer à des chrétiens de la fine bande de terre pour qu’ils visitent leur famille de Cisjordanie au mois de décembre, et éventuellement y marient leurs enfants. Souvent les jeunes époux préféraient rester à Bethléem pour y fonder leur foyer plutôt que de rentrer à Gaza. « Qui accepterait d’épouser un prisonnier, à condition d’aller en prison avec lui ? » s’interroge avec humour Gabriel Romanelli, curé de la paroisse latine de Gaza depuis quatre ans, actuellement coincé à Jérusalem. Toutes les noces ont été annulées cette année. Chacun garde l’espoir que la vie de sa promise sera épargnée.

Bébés pour la paix

Les naissances, en revanche, se poursuivent, la vie se faufilant partout, irrépressible en dépit des adversités, comme il y a deux mille ans. À la maternité de la Sainte- Famille, sise sur les hauteurs de Bethléem, tenue par l’ordre de Malte, on continue à se réjouir de la venue au monde de petits Palestiniens, qu’ils soient chrétiens ou musulmans, ultime pied de nez à ce conflit meurtrier.

Répit à la maternité de la Sainte-Famille de Bethléem.

Répit à la maternité de la Sainte-Famille de Bethléem. Axelle de Russé © pour le Figaro

« Ce matin, j’ai accouché trois femmes. L’une d’elles était dilatée à six lorsqu’elle est arrivée de la banlieue de Hébron, après avoir patienté à plusieurs check-points sur la route. La circulation étant difficile, elle avait négligé les rendez-vous anténataux des dernières semaines. Ce matin, son bébé est mort-né, raconte le Dr Raed Mashalah, âgé de 31 ans, le regard triste. Son mari n’a pas pu venir jusqu’ici. Elle est très choquée. » Dans ce lieu où dix femmes des territoires viennent accoucher chaque jour, contre douze avant la guerre, une certaine paix règne, loin de l’agitation de la rue. Le directeur français, Gilles Normand, militaire à la retraite, hasarde une explication : « Parce qu’il s’est passé quelque chose d’unique, ici, à Bethléem, il y a vingt siècles, la vie est protégée. Regardez ces nourrissons, ils sont de tout petits êtres, aussi fragiles que la paix. »


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