Article paru le 24/04/2017 sur le Journal Le Temps par François Nordmann
Antonio Guterres, Secrétaire Général des Nations unies a été officiellement reçu lundi à Berne par la Présidente de la Confédération, Doris Leuthard, et par Didier Burkhalter, chef du Département des Affaires Etrangères. Survenant moins de quatre mois après l’entrée en fonction du nouveau Secrétaire général, cette visite témoigne de la valeur que le haut dignitaire attache à ses relations avec la Suisse.
Les Secrétaires généraux des Nations unies n’échappent pas à l’habitude des observateurs de dresser un premier bilan de leur activité après cent jours. Un politologue américain a même comparé les cent premiers jours du mandat des quatre derniers locataires du 38e étage du siège des Nations unies. A son avis, si le nouveau titulaire ne profite pas de ses premiers jours de fonction pour imposer un certain nombre de réformes, il court le risque d’être paralysé, soit du fait des membres permanents qui cherchent à le contrôler, soit par la force d’inertie de la machine bureaucratique.
Réforme de la stratégie de la paix
Qu’en est-il du neuvième secrétaire général? Rappelons tout d’abord qu’Antonio Guterres jouit d’une légitimité et d’une autorité sans égales. Il est le premier Secrétaire général qui a été chef de gouvernement dans son pays, le Portugal, avant de revêtir pendant dix ans l’une des plus hautes charges des Nations unies, celle de Haut commissaire pour les réfugiés. Il a été élu au terme d’un long processus de sélection, comportant de fastidieuses auditions publiques et s’est révélé constamment le meilleur.
Il n’avait donc nul besoin de prendre des mesures spectaculaires dès son arrivée. Mais il applique méthodiquement son programme, inscrit dans la durée. Candidat de la réforme, il a fixé le cap: remettre la question de la paix dans le monde au cœur de l’activité de l’organisation, en privilégiant la notion de prévention. Il a parcouru les zones de conflit au Moyen Orient et en Afrique. Il a chargé un groupe de travail de préparer d’ici l’été la réforme de la stratégie, du fonctionnement et de l’architecture du Secrétariat en matière de paix et de sécurité. Sans attendre, il a procédé à de premiers regroupements fonctionnels entre le Département des affaires politiques et celui des Opérations de maintien de la paix, sur l’avenir desquelles il a exprimé des vues précises. Il a créé un mécanisme pour réprimer les abus sexuels dont plusieurs contingents de Casques bleus se rendent coupables sur le terrain.
Parité des genres
La mise en œuvre de l’accord de Paris sur le climat et des Objectifs du Développement durable, de même que le respect des droits de l’homme font également partie de ses priorités.
S’étant engagé à établir la parité des genres parmi les cadres de l’ONU, il a tenu parole, nommant trois fois plus de femmes que d’hommes à des fonctions de direction. Il accorde plus d’importance à la compétence des collaborateurs qu’à leur origine géographique, ce qui favorise les petits pays, mais les membres permanents du Conseil de sécurité tiennent à préserver les postes d’influence qu’ils occupent autour de lui. Il s’est donc donné du temps pour faire passer son organigramme: il a réélu les hauts fonctionnaires de son entourage pour une année seulement, se réservant de réorganiser le secrétariat à sa guise le moment venu.
Concilier la Maison Blanche
Antonio Guterres a pris ses fonctions dans un moment de tension de la politique mondiale sans précédent depuis la fin de la guerre froide, et au moment où s’installait une nouvelle administration américaine, hostile à l’ONU. Il a relevé ce défi en ignorant les provocations du président Trump et en créant un rapport de confiance avec l’ambassadeur Nikki Haley, la représentante permanente des Etats Unis à l’ONU, qu’il a amenée à corriger ses préjugés. Il a également noué des contacts utiles au Congrès et a fini par rencontrer brièvement le président des Etats Unis à la Maison Blanche la semaine dernière. Le bilan provisoire s’avère donc positif et laisse bien augurer de la suite du mandat d’Antonio Guterres.
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